Il m’arrive de temps en temps, de m’assoir avec mes filles pour regarder un épisode de Martine. Vous savez l’héroïne des livres pour enfants « Martine à la plage » « Martine prend son bain », « Martine nous gave ». Ils en ont fait un dessin animé. On se met à visionner un épisode qui met en scène Martine qui, sur un malentendu pense que ses parents vont divorcer. Elle va tout mettre en œuvre pour essayer de les remettre ensemble. Vers la fin, elle finit par comprendre que tout va bien et qu’elle s’est trompée. Le papa parlait juste de son associé.
Peu avant la fin de l’épisode, Fifille 2 met sur pause l’image et m’explique avec son fort accent américain :
–Tu sais, quand le papa et la maman se disputent trop, c’est beaucoup mieux qu’ils se séparent.
Je rebondissais en lui disant qu’elle avait raison. Parfois quand cela devenait l’enfer à la maison, mieux valait, en effet pour tout le monde que les parents ne vivent plus sous le même toit. De plus, j’avais su que l’une des petites filles de sa classe, Lizy, avait subi toute l’année une séparation cinglante entre ses parents et aucun détail ne lui avait été épargné. De plus, étant fille unique elle avait partagé tout ce qui se passait chez elle, avec une bonne partie de la classe.
Avec son air totalement innocent, brusquement ma fille me sortit une phrase qui me donnera l’impression de tomber de plusieurs étages :
–Oui, le divorce c’est très bien, mais avant, c’est mieux de se trouver un deuxième mari très riche comme ça tu es tranquille.
–WHAT ? MAIS QUI T’AS DIT ÇA ? ÇA VA PAS LA TETE ?
–Tout le monde sait ça, maman !
Fifille 1 qui était juste à côté, donnait son avis :
–Moi, je ne le savais pas ! Mais ce n’est pas mieux de se trouver d’abord un premier mari riche, et de rester mariée avec lui ?
Au secours ! Je suis en plein cauchemar ! Je vais me réveiller c’est sûr ! Sans exagérer j’étais à la limite de la nausée. Je m’en voulais de ne pas avoir abordé ce sujet plus tôt avec elles. En même temps, je n’allais pas débarquer un jour avec un tableau noir sur roulettes, m’éclaircir la voix et leur dire : Leçon numéro 3003 de la vie : Le divorce. Alors aujourd’hui nous allons voir ensemble les critères à prendre en compte lorsque vous allez vous marier ! Demain nous aborderons le sujet de l’accouchement, avec les avantages et les inconvénients de l’épisiotomie.
Il fallait absolument que je rectifie le tir et que j’enlève ces idées pourries de leurs cerveaux :
–Mais enfin, on n’a pas besoin d’un mari pour avoir de l’argent ! On va à l’école pour apprendre, faire des études, et plus tard choisir un métier qui nous plait ! C’est pour ça qu’il est important de bien travailler à l’école (allez hop vla au passage que je te tartine encore une couche pour qu’elles ne boudent pas la prochaine fois qu’on devra travailler ensemble). De nos jours, il y a même des femmes qui gagnent beaucoup mieux leur vie que des hommes. Et puis, on se marie pour fonder une famille, partager sa vie avec quelqu’un que l’on aime et qui nous aime. L’argent ne doit pas rentrer en compte.
–Ah mais je le sais bien maman, surenchérit Fifille 2. C’est juste que c’est plus facile si tu décides de te remarier avec quelqu’un qui en gagne beaucoup.
Par le choc de sa réponse, j’avais envie de me taper la tête contre le mur ! Alors de nos jours, c’était autour de ce sujet que les petites filles discutaient à la récréation ? Mais quelle horreur ! J’avais l’impression de parler à Paris Hilton en pyjama licorne, version sépharade. Je voulais monter sur une estrade, prendre un haut-parleur pour que mes paroles retentissent jusqu’au New Jersey : UNE FEMME N’A PAS BESOIN D’UN HOMME POUR GAGNER DE L’ARGENT. IL FAUT ETRE INDEPEDANTE ! COMBIEN DE FEMMES SE SONT BATTUES POUR CE DROIT ?! COMBIEN DE SACRIFICES ONT ELLES DU FAIRE POUR QUE NOUS PUISSIONS AUJOURD’HUI GAGNER NOTRE VIE DIGNEMENT !?
Mais étais-je moi-même un bon exemple pour mes filles ? Est-ce les femmes qui composaient ma famille en étaient un aussi ? Mais carrément ! De ma grand-mère, en passant par ma mère, mes sœurs, mes tantes, elles ont toutes toujours travaillé, même si elles se sont arrêtées quelques années pour élever leurs enfants. Perso, même si je suis morte de fatigue, je n’hésite pas à me coucher à quatre heures du matin pour finir un article ou chapitre. Je me revois traversant tout Paris (encore celle- là ! ) avec des valises de plus de quinze kilos de livres pour en assurer la promo ! Pour bien leur faire passer le message, je décidais de les choquer et de les mettre face à la cruelle réalité de la vie.
–Écoute- moi bien ma poulette, enlève- toi tout de suite de la tête, les mots « facile » ou « juste ». Rien n’est juste et rien n’est jamais facile dans la vie. RIEN ! On ne sait jamais ce qui peut arriver. Imagine (has vechalom) ton mari décède, tu fais comment ?
À l’unisson, mes deux filles ont poussé des hurlements :
–Ça ne va pas de dire des choses comme ça !
–Bah désolée mais ça peut arriver.
Bien sûr, étant donné leur âge (7 ans), je leur ai épargné le cas de figure ou le père décide de se faire la malle en laissant toute la charge de leurs trois, quatre enfants à celle qu’il considérait comme sa femme.
–C’est trop triste, ce que tu dis.
–C’est pour ça qu’il faut avoir son propre boulot en back up. Si tu as la possibilité d’arrêter de travailler pour t’occuper de tes enfants c’est top, mais au moins tu te laisses une option juste au cas ou….
C’est là que le petit doigt de Fifille 2 remit la suite de l’épisode, mettant fin à cette étrange conversation.
Du moins c’est ce que je croyais.
Quelques jours plus tard, comme chaque matin nous étions en train de faire les cahiers de vacances (qu’on brûle ces imprimeries tellement je hais ces trucs), plus précisément des additions. Fifille 1 craqua au bout de cinq minutes :
–Ça me saoule, je ne veux plus faire ça.
Fifille 2 qui avait fini avant, passa en trottinette et lui sortit :
–N’oublie pas sweetheart ! Si ton mari meurt il faut que tu saches compter, juste au cas où.
Oh my God ! C’est pire qu’avant ! Surtout que mon mari qui était à côté me demanda :
-Mais c’est quoi cette histoire ? Pourquoi tu mets des idées pareilles dans la tête de nos filles. Je t’ai toujours trouvé un côté gothique, voire morbide mais là tu vas trop loin, Junes ! Trop loin ! Tu vas tout de suite parler à nos filles !
-Bon on va tout reprendre depuis le début…
Je vous embrasse mes chéris. À la semaine prochaine ! Très bonnes vacances.
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Ps : Je suis en train de travailler d’arrache-pied sur mon tome 3 de la vie déjantée, je fais mon possible pour le sortir au plus vite.