Le titre de ma chronique aurait dû être : Pourquoi y a-t-il autant de divorces aujourd’hui ? Cependant, j’ai préféré piquer celui-là qui fait écho à une série israélienne sortie il y a quelques semaines sur la plateforme Netflix. En effet, même si je vais aborder LA grande question que l’on se pose tous, je me devais en parallèle de mettre en valeur le héros qui sommeille en chacun d’entre nous. Explication…
Selon les derniers chiffres du Consistoire, le nombre de divorces enregistrés vient de dépasser celui des mariages. En apprenant ce fait, entre deux after-school de mes kids, j’ai voulu comprendre. Non pas pour porter un jugement ou reporter la faute sur quelqu’un… loin de là, car chaque couple est unique avec son propre fonctionnement interne (personne à part les concernés ne peut comprendre ce qui se passe réellement entre deux personnes), mais pour y voir plus clair.
Il est vrai que pour la génération de mes parents et celle de ma grand-mère, le mot « divorcer » était limite prononcé en sourdine :
– La pauvre Miskina, elle est divorcée.
(Sans jouer les suffragettes, notez bien qu’il n’y avait jamais « le » pauvre, hein !)
Maintenant que le divorce a cessé d’être diabolisé, est-ce un bien ou un mal ? Ce n’est même pas une question, car il était urgent que cela devienne une option envisageable en cas de très gros désaccords et d’incompatibilité d’humeur. Je mets de côté les dossiers graves tels que les hommes qui frappent ou rabaissent leur femme psychologiquement dans le seul but de détruire leur conjointe, ou les addicts en tous genres qui révèlent avoir un problème psychiatrique non traité dont seules les femmes qui les ont côtoyés au quotidien s’en sont aperçues. Une fois mariées, elles découvrent le pot aux roses d’une publicité mensongère d’un produit soi-disant de qualité alors qu’il était de base défectueux. L’échec de ce type de mariage est le résultat d’un grand « sauve qui peut et viiiite ! ».
Alors comment explique-t-on ce chiffre ? Y a plus de tarés qu’avant ? Sûrement, mais pas seulement… pour cela, il nous faut un petit rappel historique ! N’oublions pas qu’en 1965, c’est-à-dire à peine 50 ans plus tôt, une femme ne pouvait pas travailler sans l’accord de son mari, ni ouvrir de compte en banque à son nom propre. C’est assez incroyable quand on y pense. En 2019, il est normal pour nous d’avoir une activité rémunérée ou une carte de crédit à son nom. Il est difficile d’imaginer un monde où toutes ces choses naturelles ne l’étaient pas justement. (#servanteécarlate #thehandmaidstale))
Du coup, il est plutôt logique de passer par une phase « extrême » de divorces en conséquence à cet héritage historique et cet ancrage de croyances familiales. La preuve avec cette phrase qui revient souvent chez la femme quand elle est en crise contre son mari :
– Attends, c’est bon ! Je ne vais pas souffrir toute ma vie pour un homme, comme ma grand-mère !
Eh oui, les femmes ne veulent plus souffrir ! Sous n’importe quelle forme. Un mari qui rentre du boulot en faisant la tête à sa femme, qui passe ses nerfs sur elle alors qu’elle-même a eu son lot de galères, c’est pas normal ! Un mari qui critique la bouffe de son épouse quand elle a passé deux heures en cuisine, c’est pas normal ! Un homme qui donne son avis sur les fréquentations de sa dame, sa façon de s’habiller, de s’exprimer, de penser ou même juger le temps qu’elle passe à faire autre chose que de s’occuper de lui, c’est pas normal !
Si je me suis permis de tailler un costume au mari, je dois aussi me mettre à la couture pour parler de ce que l’épouse peut faire subir de son côté : quand celle-ci refuse de faire à manger à son mari (tu te débrouilles tout seul, mon grand ! Je suis pas ta mère !), ni son linge (et puis quoi encore, quelqu’un s’occupe du mien peut-être ?), refuse de lui donner l’attention qu’il demande (D. en est témoin que le besoin est énorme dans ce domaine), de se taper le ménage toute seule (y a pas de raison, moi aussi je bosse !), l’homme est en droit de râler !
Petit rappel concernant l’entretien de la maison et le couple : Selon la Torah, il est vrai que la femme est censée en être en charge, SEULEMENT dans le cas où le mari va étudier la Torah. Oui, oui, la femme doit s’occuper du bon fonctionnement de la maison uniquement quand celui-ci VA ETUDIER et non rester affalé sur le divan à lire Voici, sinon y a pas de raison que ce soit la femme qui effectue toutes les tâches ménagères toute seule ! Non mais ! Y a pas écrit BECASSE ici.
Donc il est évident qu’en 50 ans, il y a eu une évolution du statut d’épouse et une redistribution des rôles. Et qui dit évolution dit changement, et un changement n’est jamais facile car il déstabilise. Avant, les femmes souffraient mais n’avaient pas vraiment l’option du divorce, car elles ne disposaient d’aucun pouvoir monétaire, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, et c’est cela qui a permis le changement.
C’est sur ce constat que je reste très optimiste sur l’avenir des couples. Oui, oui, car quand on a été privé de quelques chose pendant très longtemps, on en abuse à l’extrême jusqu’à retrouver une certaine stabilité. Prenons l’exemple d’un enfant qui n’a pas eu le droit de manger des bonbons pendant toute son enfance. Une fois adulte, il va se jeter dessus dès qu’il en aura l’occasion, quitte à en abuser et à se rendre malade. Une fois qu’il aura vu les dégâts monstrueux que cela peut entrainer, il en prendra modérément.
On est d’accord que ma comparaison avec les bonbons et le divorce est complètement pourrie, mais dans l’idée, c’est logique que les femmes de ma génération n’acceptent plus qu’on abuse de leur empathie, leur générosité, leur capacité à comprendre l’autre et à pardonner. C’est en proportion avec l’abus dont les hommes ont fait preuve face à cette capacité qu’ont les femmes à aimer sans borne. Maintenant que nous avons ce droit, sans être montré du doigt, le divorce se révèle parfois une réelle solution.
Néanmoins, dans la majorité des cas, il peut être évité si le mari ET la femme sont patients l’un envers l’autre, et s’entourent d’amis bienveillants.
Personnellement, je compare toujours les couples à des biens immobiliers. Avant de se marier, la personne est supposée s’être construite de l’intérieur en travaillant sur ses défauts et ses qualités. Quand deux personnes se rencontrent et qu’elles décident de construire un foyer, elles mettent leurs propres fondations en commun. Cela peut donner des résultats divers et variés comme une simple tente et là, au premier coup de vent, elle s’envolera très loin dans les airs. Parfois, il en ressort des maisons faites en paille, en bois, en briques, (oui comme dans les trois petits cochons). Et puis il arrive que certains couples au prix d’un énorme travail effectué de part et d’autre, obtienne un château, voire un palais. Ils auront gagné leur statut de Roi et de Reine.
Et chez Junes alors, ça se passe comment ? Non par ce que c’est bien beau de parler en général mais concrètement, il se passe quoi chez les Davis ?
Disons qu’il y’a pas mal de défis à relever. Il y a des périodes où l’on ne peut imaginer sa vie l’un sans l’autre, puis à d’autres moments, notre énergie est utilisée pour vivre l’un contre l’autre. Tout est bon pour les disputes, jusqu’à se demander ce qui nous a pris d’accepter de l’épouser. J’étais bourrée ou quoi ?
C’est pour cette raison que de temps en temps, D. nous envoie des épreuves. La mienne est simple. Il m’arrive d’être malade au point d’être clouée au lit avec 40 de fièvre et d’alterner entre crise de vomissements et maux de ventre (Le magazine Glamour, je vous écoute ? En quoi puis-je vous aider ?)
Pendant cet obstacle, plutôt que de le contourner, le Roi du Maroc (qui a obtenu son statut uniquement grâce au lieu de naissance de son père et de son caractère bien trempé), concède à descendre de son trône. De jour comme de nuit, il se montre tellement chevaleresque à mon égard que sa couronne brille de mille feux, illuminée par son courage et sa dévotion. Dans ce domaine-là, je peux affirmer qu’il est mon héros. Cette solidarité lui donne un crédit « laisse passer, ne répond pas » assez conséquent pour toute la durée du : Festival des disputes.
J’en viens souvent à me demander si réveiller l’âme du héros qui sommeille en chacun d’entre nous permet à un mariage de tenir bon et d’oublier l’option du divorce, car être une héroïne, c’est aussi accepter d’être de l’héroïne. Cette drogue dure qui fait souffrir quand on est en manque d’elle et vice versa. Et si le véritable amour et le secret d’un mariage sont au final l’exploitation de son domaine de dévotion pour l’autre…
Énormes bisous. On se retrouve mercredi pour une vidéo ?