Tout d’abord, avant de vous faire part de la conversation légèrement agaçante que j’ai eue avec une Baal Téchouva, et de vous livrer un récap’ des phrases qu’ils nous sortent à longueur de temps, je me dois d’expliquer ce qu’est un Baal Téchouva.
Selon Wikipédia, qui doit être rédigé par des hommes sexistes qui mériteraient qu’on guillotine leur main pour qu’ils n’aient plus jamais accès à un clavier de leur vie. Oui parce que l’autre fois, avec Lily ma correctrice, nous étions en train de chercher un synonyme du mot : « enceinte » (pour mon livre, pas pour moi), il y avait écrit : Grosse. Véridique mais passons, ça vaut mieux !
La définition est : « Un Baal Téchouva est une personne se repentant de ses fautes passées. Elle est éduquée en dehors du judaïsme orthodoxe ou s’en était éloignée, et choisit de revenir à ses pratiques ».
Selon Junes : Un casse-pied ! Mais non, je plaisante. Le fait est que la semaine dernière j’étais à une Bar Mitsva et après avoir discuté avec une ancienne copine, tout a bien failli tourner en vinaigre (avec l’ancienne copine, pas la Bar-Mitsva).
Je vous passe le moment où l’assistance ne savait pas si elle devait rire ou pleurer quand le petit Bar a dû lire son discours. Le teint vert, tremblant comme une feuille d’automne sous la pression, il a vomi sec sur les chaussures du Rabbin. Bref ! En cette occasion, une amie de longue date était présente, elle aussi. Au début, j’ai eu du mal à la reconnaitre parce qu’elle avait radicalement changé de style vestimentaire. Elle portait un foulard noir dont aucun cheveu ne dépassait, et une jupe jusqu’au par terre alors qu’à l’époque, elle était plutôt legging en cuir et cheveux au vent. On commence à prendre des nouvelles l’une de l’autre. Je me mets à fredonner : Qu’est-ce tu deviens, tu t’es mariée t’as trois gamins et elle me répond :
– Non, six.
– Waouh ! C’est magnifique !
–Barouh Hashem, et Besrat Hashem, on espère avoir un septième.
– Ah merveilleux.
Je n’ai même pas tiqué quand elle a prononcé Beezrat avec un « s » mais l’ai de suite renommée « B.B. ». C’est le petit diminutif que je donne à tous ceux qui ponctuent chaque début, milieu et fin de phrase par Barouh Hashem & Beezrat Hashem. On continue de papoter, et je me rends vite compte que copina emploie un mot sur deux en hébreu, ce qui est le signe que son changement est aussi intérieur. Tout allait bien quand elle se met à lorgner ma robe qui laissait mes clavicules apparentes (de deux millimètres ça va, non ?). D’un coup, elle me sort :
– On voit tes os, tu devrais monter un peu ta robe.
J’ai envie de lui répondre un gros : « je me mêle, moi, de tes os ? » Mais ne voulant pas me montrer désagréable, je ne dis rien. Croyez-moi, parfois, tenir sa langue est bien plus dur qu’il n’y parait ! Devant mon manque de réaction, la gueuse se permet de remonter mon haut ! Un peu énervée, et pensant très fort un « bats les pattes ! », je me décale pour mettre une distance de sécurité entre cette « nouvelle personne » et moi. Hélas, elle se rapproche et continue à me parler, et me demande si mon père est toujours Rabbin. Je me radoucis et lui explique que c’est un titre à vie, comme médecin ou avocat. Je lui donne une autre chance, et décide de continuer de papoter avec B.B. Le plus drôle, c’est quand elle me donne des nouvelles de ses enfants, qui se nomment respectivement : Jordan, Liberty, Cruise (comme Tom !) Mendel, Schneerson et Perla. On sent le revirement à 360 degrés juste après le petit Cruise, qu’elle veut d’ailleurs changer en David.
D’un coup, elle m’explique qu’elle et son mari ont déménagé à Brooklyn car ils trouvaient que Manhattan n’était pas assez religieux pour eux.
– Et toi, tu penses à déménager ?
– Non, j’aime bien l’école de mes enfants. Ça me convient.
– Ah mais au fait toi Junes, ton mari, il est ashkénaze ou sépharade ?
– Techniquement sépharade, mais il est très ashké, pourquoi ?
– C’est bien ce que je pensais…
Intriguée, je lui demande à quoi elle fait allusion. Copina se sent obligée de m’informer à 7h50 du matin, au cas où je ne serais pas au courant qu’étant sépharade, je n’ai pas le droit de porter la perruque mais uniquement le foulard… comme elle !
Mon sang ne fait qu’un tour car j’ai déjà fait le tour de la question, et j’ai une envie soudaine de lui ressortir quelques anecdotes pas très catholiques, ni très juives d’ailleurs, la concernant. Je veux rugir comme une lionne ces mots :
– J’ai des gros dossiers sur toi, ma cocotte, alors commence pas à faire ta relige avec moi, parce que je ne t’ai pas attendue pour savoir ce que je dois porter sur la tête, ni ailleurs, non mais !
Quand soudain elle me confie qu’une tragédie a touché le frère de son mari, et toute la famille a fait un grand retour. Ils ont modifié du mieux qu’ils pouvaient leur mode de vie. Au fond d’elle-même, elle est terrorisée d’aller trop vite, alors il lui arrive d’en fait trop dans le seul but d’en faire assez. D’ailleurs, elle me demande si je peux lui indiquer où on en est dans la prière, car elle a du mal à s’y retrouver parfois.
Mon cœur fond devant cette confession intime et je la rassure :
– Allez ! Ne t’en fais pas doudou, je vais tout te montrer. Tu as fait d’énormes progrès, et tu peux être fière de toi.
– Barouh Hashem. Besrat Hashem faut que tu viennes à la maison. Pourquoi pas mardi Bli Nédèr pour…
Oh boy et ça recommence !
La suite, c’est que le petit Bar-Mitsva avait D. merci retrouvé des couleurs et a pu finir, pardon commencer son discours. Plus tard, avec B.B, on est descendues pour manger un petit déj’ sympa. Je vous passe le moment où j’ai voulu de nouveau l’étrangler quand elle m’a demandé si j’avais fait Nétilat/laver les mains quand j’ai mordu dans un bagel. Plutôt que de la mordre elle, j’ai menti en prétendant qu’il était Mézonot. Voilà ! Maintenant, j’ai plus qu’à faire Téchouva sur ce mensonge honteux. Mais il faut aussi insister sur le fait que les Baalé Téchouva ont beaucoup de mérite et sont la fierté de notre peuple.
Heureusement que vous êtes là. Vous êtes notre étendard, notre espoir à tous qui prouve qu’avec beaucoup de courage et de persévérance, on peut changer réellement et sincèrement de tout son cœur. On doit tous prendre exemple sur vous (mais si vous pouvez éviter les remarques que vous ne pouvez pas vous empêcher de nous faire, ce serait top !).
Maintenant, place aux phrases les plus récurrentes que l’on retrouve chez les BB :
Déjà tous les B.T qui ne sont pas familiers avec le monde des religieux voient tous les hommes habillés en noir et qui portent un chapeau comme des Rabbins :
– T’as vu, y a un rabbin. J’ai peur.
– Non chouchou, c’est juste un monsieur habillé en costume qui va bosser à la banque et qui porte un chapeau. Détends-toi.
Et ils sont vite choqués… et souvent déçus.
– Regarde y a un Rabbin et il fume. Moi, je trouve ça grave.
– Oui, c’est un être humain comme toi et moi, trésor.
– Ouais, bah c’est pas normal.
– C’est du lait Chamour/surveillé ce que tu manges ?
– NON ! Ne ruine pas mon Kinder country, steuplait !
– Et ton père, il dit rien que tu portes la perruque ?
– …
– T’as tellement de chance d’être une fille de Rabbin et de Rabbanite. J’aurais rêvé être comme toi.
– Pardon ?
– D’être toi, pardi ! Bah oui, moi, mes parents, ils mangent même pas cacher. Toi, t’as jamais eu à te galérer à leur imposer deux vaisselles, à demander qu’ils baissent la télé Chabbat, à te battre pour qu’ils t’acceptent en jupe, à…
– Tu vas manger tes frites ?
– Non, mais tu vois, j’aurais trop aimé aller dans une école juive comme toi, recevoir une éducation juive, à…
– Je peux les finir ?
– Oui, à apprendre à lire en hébreu parfaitement, à…
– Tu me passes le ketchup. Steuplait.
– Tu m’écoutes au moins ?
– T’écoutes de la musique de goy ?
– Oui.
– T’as pas peur pour ton âme ?
– Et toi, avec toutes les sorties en boite du passé, et ton déhanché sur le dance-floor, t’as pas peur que ça vienne te hanter ?
– Tu regardes les séries ?
– Oui.
– T’as un smartphone ?
– Oui.
– Je crois qu’on va arrêter de se voir. Tu me tires vers le bas.
– Dommage que nous ne sommes pas en mer, je t’aurais tiré un boulet de canon en pleine tête.
– C’est cacher ?
– Oui.
– C’est quelle Téouda ?
– Euh…je sais pas.
– Tu devrais faire plus attention Junes, non vraiment, tu ne peux pas être aussi négligente.
– Je voudrais te rappeler le nombre de filet au Fish que tu t’es enfilée, me jurant que le Sundae était soit disant Cacher pendant que MOI je mangeais vraiment cacher mais je ne vais pas te rappeler tes nombreuses fautes du passé car il parait que c’est interdit. Eh oui, moi aussi je connais des lois, chou !
Il y en a des tas d’autres mais je vous laisse le soin de me les noter dans les commentaires. Je vous embrasse et heureusement qu’on rigole ! Bisous.
J-moins quelques jours de la parution de mon prochain roman : Le Temple du temps qui sera disponible sur amazon et mon site.