Lundi dernier, c’était avec une profonde tristesse que j’appris le décès de Getty, la maman d’un garçon DE la classe de mon fils. À peine trois mois auparavant, au cours d’une soirée, nous étions en train de discuter. , La maladie l’avait emportée de manière foudroyante. Autant vous dire que ma journée avait été ponctuée par des vagues de sanglots et un tsunami de chagrin. Elle était un ange de gentillesse et je n’écris pas ça, juste parce que je flippe qu’elle vienne me chatouiller les pieds dans mon sommeil (ma hantise !)
En prenant trois mille pincettes, je partais l’annoncer à mon fils. Les pincettes avaient été superflues puisque depuis deux bonnes heures, la nouvelle avait été annoncée sur le tchat commun de la classe.
–Tu sais qu’on va devoir aller rendre visite à Shmouel et à sa famille. Ils rentrent dans la période de Shiva et ils n’ont pas le droit de sortir, à part pour se rendre à la syna. Ça va lui faire du bien de te voir.
–J’ai déjà écrit dans le groupe que j’étais désolé pour sa mère. Ça suffit non ?
–Cela ne suffit pas du tout ! Déjà, tu lui envoies un message en privé, et dis-lui que tu passes demain.
–Ok pour le message privé mais de là à aller le voir….
Depuis cinq ans, ils sont dans la même classe mais autant vous dire qu’ils n’ont jamais été meilleurs amis, juste indifférent l’un à l’autre. Le lendemain, je demande à mon mollusque vivant d’ado d’enfiler ses baskets afin de nous rendre au Shiva. Je ne souhaitais pas que mes filles nous accompagnent. Chez nous, il y a une ancienne tradition (bêtise ?) que les jeunes filles (pas mariées, et SANS enfants) sont interdites de visite aux endeuillés, sauf si c’est de la famille. À chaque pleine lune, je me coupe les pointes des cheveux et une très vielle Mama superstitieuse, assez velue, prend possession de mon corps en lançant des règles de vie à voix haute. J’ai essayé plusieurs fois de la tuer mais elle est increvable).
Mon fils ne se montre pas spécialement réceptif à ma demande et sa seule question fut :
–Pourquoi faire, si je lui écris déjà un mot en privé ?
–En tant que camarade de classe, dans un moment pareil, c’est important de lui montrer ton soutien.
–Je ne suis pas d’accord. On ne s’est jamais vraiment parlÉS et je ne vois pas pourquoi je dois faire semblant de m’intéresser à lui, maintenant que sa maman n’est plus là . Je trouve cela hypocrite.
–Là, il ne s’agit pas d’hypocrisie mais il est question de devoir envers un autre être humain que tu connais.
– En plus, l’ambiance va être trop bizarre, je ne saurais pas quoi lui dire.
–Dans la vie, accomplir son devoir n’est pas toujours plaisant ! C’est pour ça que ça s’appelle un dev…
Il lève son doigt en l’air et me demande de patienter deux secondes. Son insolence me donne une envie de le frapper surtout quand je le vois pianoter sur son phone :
–Bon, apparemment ton truc de devoir et tout le tralala, te donne raison. Tous ceux de ma classe qui ne sont pas en vacances, sont déjà partis le voir.
–Ah, tu vois !
–Oui, mais ce qui m’embête chez toi, c’est que tu es trop spirituelle. À force ,cela me tape sur les nerfs. Et puis, ta voix m’exaspère ! Je n’aime pas quand tu chantes. Si seulement tu pouvais devenir aphone, au moins pour une semaine, là, je serais vraiment en vacances
Seigneur ! Ô toi Éternel donne-moi la force de ne pas répondre. Ce ne sont que ses mauvaises et impitoyables hormones qui s’expriment à travers la bouche de celui que je nomme encore mon fils.
On arrive là-bas et une dizaine d’hommes sont présents. De la petite à la grosse Kippa en passant par différentes tailles de barbe. Pas l’ombre d’une femme à l’horizon. Flute ! J’accompagne mon fils jusqu’à chambre du petit Shmouel, et me fais vite éjectér. Je reviens dans le salon et me trouve nez à nez avec le papa, Marc, le mari de Getty. Je bredouille dans mon anglais rouillé (ça fait un mois et demi que je n’ai pas prononcé un mot d’anglais ou très peu). Je m’entends lui dire la formule consacrée « I am so sorry for you loss (avant je disais « lost » comme la série !). J’aimais vraiment beaucoup Getty. Il me remercie et je reste plantée là ,comme une courge au milieu d’un potager de patates bio.
Un monsieur vole à mon secours, et très gentiment, m’ouvre une chaise pliante pour que je vienne m’asseoir à côté de lui, face au papa. Oy ! Je suis méga gênée.
Bureau de la Tsniout bonjour. Je vous écoute ? Non, madame notre règlement nous interdit de nous asseoir parmi des hommes.
Je raccroche avec l’opératrice et sous la pression de mon inconfort, je prends tout de même place (moins quarante points pour Junes !). Le monsieur, Steve m’explique qu’il est marié avec la sœur du papa. Je bredouille trois mots. Entendant mon accent étranger, il switche direct en français et demande d’où je viens. Marc répond à ma place :
–De Paris. Ils sont français. D’ailleurs, Léa et moi avons toujours rêvé d’effectuer un voyage dans la ville la plus romantique du monde. Malheureusement, nous n’avons pas eu assez de temps…
Mes larmes menacent de déborder de mes yeux à tout moment. Puis, il un blanc pesant s’installe entre nous trois. Heureusement que Steeve le dissipe rapidement en me branchant sur le sujet préoccupant de l’antisémitisme en Europe. Allez hop, on a gagné trois minutes de conversation et on enchaine sur la dirlo (un sacré personnage !) de l’école de nos enfants. Marc me demande si je l’apprécie. Ma petite carrière au pays de l’oncle Sam m’a appris au moins une chose : rester politiquement correct en toutes circonstances. Je déteste ça mais cela fait partie du package d’être adulte : maitriser le fond de ses pensées. Mon D. ce que c’est frustrant à long terme de devoir faire attention sans cesse à ce qu’on dit. Pour obtenir un ticket de la « journée porte ouverte à la parole », il faut réfléchir et surtout évaluer la personne face A nous. Clairement ,avec Marc et Steeve ce n’était ni le lieu, ni le moment de critiquer (pas la personne, s’entend) la manière dont la dirlo gérait sa fonction. En tant que représentante de la famille Davis, il fallait se montrer élégante et se TAIRE ! Déjà que la plupart des amérloques nous prennent pour des originaux avec nos 35 h et nos manifestations à tout va, sauvons ce qui est à sauver. Apercevant une nouvelle vague de nouveaux visiteurs masculins (Où sont les femmes ? Avec leur geste plein de chaaaaaaarme ! Ethan a raison, même quand j’écris je chante. Faut que j’arrête.), je prends congé et part chercher mon fils.
Quand il me voit arriver, il se lève d’un bond. En sortant de l’appart, il me dit :
–Maman, t’as mangé un truc quand tu étais dans le salon ?
–Non, pourquoi ?
–Ah alors juste pour te prévenir, que depuis que nous sommes arrivés, tu as un bout de tomate coincé entre les dents.
–Non ce n’est pas vrai ! Tu me charries ?
Je prends vite mon tel pour me regarder et OH MY GOD ! LA HONTE SUPPRÊME !
–T’en fais pas ! Le plus grave c’est ta jupe.
–Elle a quoi ma jupe ?
–Elle est ouverte.
Je jette un œil et effectivement je n’avais pas remarqué qu’on voyait un morceau de cuisseau de ma personne. Maudite jupe portefeuille ! Le bouton avait sauté. J’avais été si mal à l’aise que j’avais fait abstraction de ma tenue (et probablement de mon cerveau aussi !). Eh bien, bravo madame la relige ! Bel exemple.
Le soir, j’ai le Duc au téléphone et lui raconte ma journée avec en prime la honte de tomate entre les dents (je passerais sous silence l’incident de la jupe). Dans les 20 % qu’il retient de mon débriefe, il restera bloquÉ sur :
–Donc même dans des Shiva la meuf se fait draguer.
–Ça va pas la tête ? J’étais en compagnie d’une famille en deuil ! Je ne savais pas ou m’assseoir et Steeve m’a gentiment proposé un siège, je n’allais pas dire non.
–Ben non voyons ! Pourquoi dire non à Steeve ? Et pourquoi ne PAS prendre sa chaise et la mettre en retrait, trois mètres plus loin ? C’est pas une possibilité ça !
–Ne vois pas les choses comme ça, elles sont déformées ! Quel intérêt d’y aller si ce n’est pas pour soutenir le papa. Arrête d’être si jaloux, c’est fatigant ! En plus, avec la feuille de salade j’ai éliminé de manière radicale toute partie glamour de mon être.
Heureusement, le Duc sort de sa botte secrète, l’une de ses légendaires phrases incroyablement romantiques qui m’aide à supporter ce côté pénible : –Junes, même avec ton bout de tomate entre les dents, tu restes une femme « draguable » ! Bon qu’est-ce qu’on mange de bon ce soir ?
Je vous souhaite de passer un super mois d’Aout ! Gros bisous
Ps : Je boucle mon tome 3 et envoieS mon manuscrit se faire une beauté chez le shampouineur pour vous sortir bientôt la suite de mes aventures volumes 3 : La vie qui tique !
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